" ... and wash away what I've done "

[PV KEITH]

Esteban avait une chanson dans la tête.
Une chanson qu'il n'aimait pas vraiment. Mais il avait entendu plusieurs personnes la chanter, ou la marmonner, ou la meumeumer, ou la... comment ça : 'on sait è_é'... Ok, ok je me tais T_T.

Bref, et maintenant, Esteban l'avait en tête aussi. En plus une fois qu'on avait la chanson en tête, on était o-bli-gé de la chanter à son tour. C'était psychologique ! Le pauvre prof de potion n'avait pas arrêté de dodeliner de la tête au rythme de la chanson, et une fois qu'il était seul de la chantonner, c'était infernal. Plus il la chantait, plus il l'avait en tête. C'était un cercle vicieux dont Esteban doutait sérieusement de sortir. Il essaya de donner cours sans trop se trémousser et y arriva à peu près, malgré un petit problème lorsque la classe avait été silencieuse, les élèves occupés à lire le livre, il avait laissé échapper une petite note, et avait fait semblant de rien. C'était horrible, Este n'en pouvait plus. Il aurait voulut l'extirper de force, mais comment faire ? En plus elle l'empêchait de réfléchir correctement. Plusieurs fois durant la journée, il avait dit des inepties.

L'après midi, le professeur de potion était allé s'exiler dans le parc, vu qu'il n'avait pas cours. C'était intéressant d'être prof : on avait beaucoup de temps libre. Malgré la chanson qui tournicotait dans ses pensées, il réussit à ne plus chanter, et même à s'endormir. C'était agréable de dormir dehors. Les rayons du soleil vous berçaient dans des rêves et non des cauchemars. Cela faisait longtemps qu'Este ne faisait pas de cauchemar en dormant. D'ailleurs il louait le fait que les professeurs aient des chambres uniques, car il ne comptait plus le nombre de fois qu'il s'était réveillé en hurlant, en sueur, des images imprimées dans ses rétines. Et ce n'étaient des images agréables ou tout allait bien dans le meilleur des mondes. Pas du tout même, c'était plutôt l'autre version. Celle où tout-va-mal-dans-le-plus-horrible-des-mondes.





C'est donc complètement reposé qu'il ouvrit les yeux pour voir les derniers rayons du soleil disparaître du ciel. Déjà la nuit ? Esteban qui était adossé au tronc d'un arbre, se redressa lentement, battant paupière et tentant de remettre ses idées en place. Lorsqu'il vit enfin plus clair dans sa tête, le soleil était couché, et il faisait noir. Il sortit sa baguette de sa poche et murmura

- Lumos !

L'extrémité de sa baguette s'illumina faiblement et éclaira un peu la nuit. Esteban frissonna. Il n'aimait pas la nuit, pas du tout. Elle lui rappelait des choses qu'il aurait préféré oublier. Ses poignets le picotèrent. Les doux rêves de l'après-midi s'étaient volatilisés. Este se frotta le bras gauche qui tenait la baguette et se dirigea rapidement vers l'école. Il entra dans le Hall et dirigea ses pas vers les escaliers qui montaient, et hésita. Il avait éteint sa baguette et l'avait remise dans sa poche. Son regard se porta des escaliers à une petite porte qui menait au sous-sol. Il se fit bousculer par un élève qui s'excusa avant de monter quatre à quatre les marches. Esteban fit son choix et referma la porte derrière lui.

Le noir complet. Esteban avait des sueurs froides, et il était tiraillé entre l'envie de descendre, encore et encore, de s'enfoncer dans les ténèbres, ou de remonter à la surface, vers la lumière. Sa main plongea dans sa poche et ressortit la baguette qui s'illumina sous l'ordre de son maître. Et Esteban descendit la première marche, puis la deuxième et la troisième et il se retrouva en bas, l'air hagard. Quelle heure il était ? Il ne savait pas. Il ne voulait pas savoir. Pourquoi était-il descendu ? Mystère. Mais il était descendu.

Son souffle devint court pendant qu'il s'enfonçait encore plus bas, dépassant sa salle de potion et les cuisines. Il arriva aux cachots. Il se laissa glisser, le dos contre la pierre. Sa baguette s'échappa de ses mains et roula plus loin, le plongeant presque dans le noir. Esteban se recroquevilla et plongea sa tête entre ses genoux. Il avait le coeur oppressé et la gorge serrée. Il sentit ses doux yeux gris se remplirent de larme. Et la Voix revint, le taraudant. Il n'avait pas la force de reprendre sa baguette et de remonter. Il étouffa un sanglot et se mordit violement la lèvre. Mais bientôt les larmes ruisselèrent sur ses joues pâles. Ses longs cheveux noirs formaient un rideau derrière lequel il se cachait. Il espéra que personne n'arrive. Et continua de pleurer.

Il pleurait pour beaucoup de raison. Sur sa vie, ses amours, sa mère et son frère. Ses déceptions, ses erreurs. Sa faiblesse. En ce moment, il se méprisait, si fort, qu'il aurait pu s'etouffé. Sanglotant doucement, il fouilla dans une de ses poches et ressortit quelque chose qui brilla dans la faible lumière de sa baguette. Il serra cet objet dans sa main droite, et celle-ci se mit à saigner. Le sang coula bientôt à flot, et il continuait de pleurer, silencieusement. On n'entait que sa faible respiration. Il avait tellement l'habitude de pleurer sans bruit, de se faire mal sans bruit. C'était normal. Et méprisant.

Pourquoi, pourquoi ?

Keith était perdu, ce soir là. Pas vraiment perdu, mais pas au meilleur de sa forme. En effet, la personne qui faisait battre son cœur comme pas possible n’était pas disponible pour lui ces temps ci – en tant qu’ami, bien sûr, vu qu’elle ne savait pas une once des sentiments que Keith éprouvait à son égard – à cause de son travail, et comme une drogue, il avait besoin de sa présence.
Et ça l’énervait… Vraiment.
Keith, dans un état de dépendance... Et puis quoi encore ? Enfin, tout pouvait arriver, la preuve. Mais le reconnaître le mettait en fureur, parce que, voilà quoi, lui dépendant. A t'on déjà vu un vampire se prendre de passion pour quelqu'un, pour une autre raison que son sang... ?
C'était la décadence même pour Keith, mais il ne pouvait s'empêcher de rêver de ce corps de rêve, qui allait avec quelqu'un de parfait... Et d'ailleurs, son inquiétude sur le manque de nouvel de la part de son Idéal l'inquiétait, ce qui l'empêchait de dormir.
C’est pourquoi il désertait le dortoir des Serpentard. Tout d’abord, il ne voulait pas prendre le risque de prononcer Le nom, et que son secret soit dévoilé… Il faisait tant d’effort pour le cacher – quoi que, Ryan son meilleur ami avait tout découvert. Mais bon, il n’était pas son meilleur ami pour rien, après tout – que ça serait tant d’années à faire l’effort de ne pas être démasqué gâchées.
Et donc, il suivit ses pas, ne s’éloignant toutefois pas trop de la salle commune afin de pouvoir y retourner assez rapidement, s’il venait à en ressentir le besoin pour quelque raison que ce soit. Ceci dit, il aurait préféré se trouver dans le parc, allongé au pied d’un arbre, à contempler les étoiles, mais bon : comment aurait il justifié sa présence ?
Il était un vampire, il était pas mal surveillé, et en plus, par le manque, il n’était plus tout à fait lui, en ce moment même… Ses canines ne se voyaient pas, mais il n’était pas loin du stade de l’inconscience. C’est pourquoi sortir dans cet état et risquer de tomber sur quelqu’un n’était pas très intelligent. Là, il était encore assez calme et maître de lui même, mais à l’air libre et avec peu de contrainte, ça ne serait sans doute pas le cas.
C’est ainsi qu’il s’arrêta au détour d’un couloir, avant d’arriver vers les cuisines, où il pourrait se faire démasquer par un elfe un peu trop consciencieux et respectueux de son maître. Il s’adossa contre un mur, pensant se trouver seul, quand il se rendit compte qu’une masse sombre se trouvait en face de lui, et crut entendre des sanglots…
Nul ne saurait dire si c’était l’ambiance bizarre de cette nuit, ou bien la pleine lune qui eut un effet sur Keith, mais il se montre étonnement doux envers la personne… Il s’approcha d’elle, écarta ses cheveux de son visage, et pensa un visage soucieux sur lui – car il s’avérait que c’était un homme, et même un prof. Mais Keith se souciait peu des répercutions, pour le coup.

« Hey. Qu’est ce qui ne va pas ? »

Esteban aurait voulut disparaître sous terre, mille pieds sous terre, disparaître de la surface. Disparaître, être effacé, ne plus exister. Son coeur se serrait, se tordait, lui faisait mal. Pitié, que cette douleur cesse. Il tentait sans succès de retenir les larmes de couler. Mais elles inondaient son visage, noyaient son coeur, le tuaient. Il voulait mourir. Sa main droite se serra brusquement sur le bout de verre. Il s'entailla profondément la peau, il sentit une première perle rouler, puis une deuxième. Et pour finir, le sang, poisseux trempa sa main et le sol. Mais qui faisait attention a lui de toute façon ? Pour qui était-il important ? Personne. Il était seul. Enfin pas tout a fait. La Voix était là. Elle ricanait dans son esprit, tournait le couteau dans ses multiples plaies. Lui en ouvrait d'autre. Si elle avait été réelle, Esteban serait mort. Il sentait son esprit emprisonné dans une cage, et il hurlait, silencieusement. Personne ne l'entendait, et personne ne l'entendrait jamais. Qui se souciait d'un pauvre et pathétique professeur de potion, au visage froid et parfois méchant ? Qu'il était méprisable. Qu'il pourrisse ! Meurt, meurt, meurt. Lui répétait la voix. Et les larmes roulaient sur ses joues, et il mourrait à petit feu, perdant son âme.

Ses grands yeux gris bordés de longs cils noirs étaient voilés par un voile blanc, sa vue était brouillée par les trop nombreuses larmes. Il avait mal, si mal. Mais pas une douleur physique que la magie aurait rapidement effacée... Non non, une douleur lancinante, qui se réveillait lorsqu'il dormait, qui le prenait. Une douleur enfouie depuis si longtemps. Les mèches devant ses yeux étaient elles aussi trempées par ses larmes. Son cou était moite, et sa main saignait. Mais il ne sentait pas cette douleur. Il avait si mal, autre part. Sa main se resserra sur le bout aiguisé et un nouveau flot de sang jaillit. Si mal, si mal. Comment pouvait-on avoir si mal ? Alors qu'un nouvel arrivage de larme arrivait, il se mordit la lèvre. Et se fit tout petit. Il venait d'entendre des pas. *NON ! NON! Partez, ne me regardez pas ! NON! Partez, je vous en supplie... Laissez moi....*.

Une sourde panique envahit ses veines, l'engourdissant. Ses paupières se fermèrent à demi, et sa main droite lâcha le bout de verre, laissant échapper un petit bruit. Elle retomba sur le sol, sur son sang, saignant encore. *Non, pitié, partez, partez, ne venez pas, ne me regardez pas. Je suis si méprisable...*.
Malheureusement, les pas s'arrêtèrent près de lui. Esteban retint son souffle. Espéra si fort, resta immobile. Les larmes continuaient de perler de ses longs cils. Il crut que la personne ne l'avait pas remarqué. Mais bientôt, les pas se dirigèrent vers lui. Un froissement de vêtement lui apprit que cette personne s'abaissait devant lui. *Non !! Ne me regardez pas !*.

Mais Esteban était trop faible pour esquisser un geste. Une main froide balaya le rideau qui le protégeait du monde extérieur. De nouvelles larmes jaillirent du coin de ses yeux. Sa vue se brouilla. Qui était-ce ? Il voyait flou, il n'entendait presque pas. Il parlait ? Pourquoi ? Non ! Non ! Soudain Esteban crut voir son frère. Il étouffa un gémissement, et frissonna.

- Iaaan.....

Il ne comprenait plus, rien. Il n'arrivait plus à bouger. Il pleurait. Il avait honte. Il voulait mourir. Esteban murmurait encore le nom de son frère. Puis se tu. Au prix d'un immense effort, il souleva sa main droite, ensanglantée, et toucha la joue de celui qui l'avait vu. Un élève ? Qui ? Esteban n'arrivait plus à aligner deux mots, ou une pensée. Il délirait complètement. Pleurant, sans plus dire un mot. Sa main glissa et retomba par terre, laissant une traîné de sang sur la joue de celui qui était en face de lui.

Lorsque sa main retomba à terre, la douleur fut telle qu'il gémit plus fort. Douleur physique. Mal. Esteban avait les yeux révulsés, et ses larmes coulaient sans qu'il ne s'en rende compte. Il avait tellement mal. Trop mal. Et la voix qui revenait. Lui disant des choses qu'il aurait aimé oublié. Oublié ce qu'il avait fait. Effacé ce qu'il avait fait, comme si ça n'avait jamais existé. Il aurait voulut être amnésique, il aurait voulut être mort, il aurait voulut ne pas connaître ce qu'il était. Son esprit embrumé ne comprenait plus rien. Son cerveau disjonctait. Il voulait rire, il voulait pleurer. Il voulait vivre, et il voulait mourir. Il ne savait pas ce qu'il voulait. Mais l'avait-il déjà sus ? Il voulait, il voulait... revoir Ian. Cette pensée éclaira subitement les ténèbres qui l’entouraient. Il voulait revoir son frère. Et cette pensée le renvoya tout aussi brusquement dans les ténèbres encore plus sombres qu'avant. Le noyant dans sa tristesse. Son coeur se serrait au point d'éclater. Il avait mal aux yeux de pleurer ainsi. Il avait mal à la main pour l'avoir déchirée ainsi. Il avait mal au coeur. Il avait mal à la tête. Aucune partie de son corps et de son être n'avait été épargnée. Mal, mal si mal, trop mal. Le sang poisseux l'odeur si forte, la tête lui tournait, son estomac se soulevait. Le coeur au bord des lèvres, il ne voyait plus ce qu'il était censé voir. Noir, absolu. Ténèbres infinies. Il était mort? Que se passait-il?

Un flash aveuglant surgit soudain dans son esprit. Et il tomba évanoui au moment où celui qui était devant lui, lui tapotait la joue.

Ses yeux papillonnèrent et se fermèrent. Un long souffle s'échappa de ses lèvres ensanglantées. Il glissa et tomba sur le côté droit. Dans le sang de sa main. Sa poitrine se soulevait doucement. Lentement. On n'entendait pas son souffle. Il resta prostré pendant de longues minutes qui semblèrent des heures car il n'y avait pas de bruit.

*Il était seul. Il avait froid. Il faisait sombre. Il faisait noir. Qui était-il ? Que faisait-il. Son regard observa ses mains. La droite avait une cicatrice qui la barrait en deux. Ses poignets étaient pleins de cicatrices. Il avait... mal ? Non, il ne sentait plus rien. Il fit un pas. Tomba. Ouvrit la bouche pour hurler, aucun sons n'en sortit. Il s'écrasa par terre. Se releva et soudain un tremblement de terre. Et une vague gigantesque, d'un rouge sang, accompagnée par des milliers de voix qui l'accusaient, l'engloutit brusquement.*

Il se réveilla, haletant, la peau couverte de sueur. Terrifié. Il ouvrit les yeux. Il rencontra du noir. Il referma les yeux. Du noir. Noir, partout, noir omniprésent. Le monde était-il si noir? Ou, c'était lui le noir? Il gémit, mais il ne pleurait plus. Il n'avait plus ni force ni larmes. Il se redressa, prenant appuis sur le sol, mais retomba, une douleur fulgurante à la main droite. Il tendit l'oreille. Il y avait quelqu'un?
Il se sentait moins mal qu'avant, l'esprit était plus clair. Il n'avait plus mal à l'intérieur. Ou si, mais c'était une douleur endormie. Celle qu'il avait tout le temps. Celle qui ne le quittait pas. Il avait mal à la main. Tellement mal. Il se redressa à nouveau, ne s'aidant que de la main gauche. Et leva sa main droite devant ses yeux. Elle puait le sang. Il ne voyait presque rien. Mais un soupire le fit sursauter.

- Il... Il y a quelqu'un ?

Sa voix rauque se brisa, il ressemblait à un grand enfant. Un grand enfant perdu...