Mise au point [ Corentin >3 ]

Evanna décida de garder ses cheveux lâchés sur ses épaules et se mit en quête d’une étole dans le grand foutoir qu’était devenue sa malle. Après quelques minutes à chercher en vain elle se décida à se servir de la magie. Enfin, une longue écharpe vint s’enrouler délicatement autour de son cou. Elle consulta sa montre : il était tout juste dix heures, le parc serait encore désert, surtout que la plupart des élèves étaient rentrés chez eux pour les vacances de toussaint. Elle, avait préféré rester, son frère Charly l’avait prévenu qu’il ne se trouverait pas au manoir des O’Connor puisqu’il partait avec des amis en Nouvelle-Zélande. Avait-il vraiment besoin de partir si loin ? Ne pouvait-il pas inviter ses amis chez lui pour profiter en même temps de la présence de sa petite sœur ? Apparemment non… Hm de toute façon elle n’avait pas son avis à donner.

Une fois prête, la serdaigle quitta les dortoirs, traversa la salle commune où un feu ronflait déjà dans la cheminée. Quelques élèves étaient affalés dans les fauteuils. Une partie passionnante d’échecs se déroulait près de la fenêtre et à l’évidence c’était le deuxième année qui allait gagner et ce ne devait pas être la première partie qu’il remportait vu la mine boudeuse de son adversaire. Evanna rit sous cape. Elle éprouvait le besoin de se réjouir de chaque petite chose qu’elle vivait. Depuis que Corentin lui avait avoué ce qu’il avait fait à la neige tout avait été chamboulé. Elle était amoureuse d’un meurtrier mais si, elle en était sûre, il n’avait pas agi selon sa propre volonté. La jeune fille secoua la tête pour chasser ses idées noires et emprunta le passage qui menait au grand couloir. Elle dévala les escaliers en sifflotant, inclinant de temps à autre la tête pour saluer des camarades. Il y avait des jours où elle n’avait pas envie de parler, pas parce qu’elle était de mauvaise humeur, simplement elle ne voulait pas échanger de mots avec les autres.

Enfin elle arriva dans le hall et poussa les lourdes portes en chêne. Une fois dehors elle inspira et expira profondément. Le soleil joueur venait d’apparaître derrière un nuage. Evanna profita de la chaleur de ses rayons sur son visage en fermant les yeux. Puis après quelques secondes elle se mit en marche, une légère brise soufflait et elle frissonna. Elle aurait peut-être dû prendre une veste pour mettre au-dessus de sa chemise bleu marine qu’elle portait sur un jean et des converses. Tant pis ! Elle attraperait un rhume et grelotterait pendant quelques jours mais elle n’avait pas l’intention de se retaper tous les escaliers qui menait au septième étage. Elle aurait pu se servir d’un sortilège d’attraction mais si, sur son chemin, le gilet rencontrait un petit malin, elle aurait tout perdu. Puisque de un, elle n’aurait toujours pas de pull et de deux elle n’aurait pas de veste à mettre le lendemain quand elle serait enrhumée. Elle se dirigea à pas lents vers le lac et plus précisément elle voulait emprunter le grand pont de pierres blanches qui l’enjambait. Sans savoir exactement pourquoi, elle appréciait cette passerelle.

Avec un sentiment de sérénité elle gravit l’édifice. Elle adorait le bruit mat de ses baskets sur les grandes dalles blanches. Arrivée au milieu du pont, à l’endroit où il était le plus haut, elle se hissa sur le rebord et passa les jambes du côté où le pont surplombait l’eau. Elle pouvait voir son reflet à la surface de l’eau c’était plutôt drôle. Elle balança ses pieds au dessus du vide comme quand, plus petite, son père l’asseyait sur une chaise et que ses pieds ne touchaient pas parterre elle balançaient ses jambes. C’était un de ses petits plaisirs.

Evanna avait changé depuis la rentrée. Autant sur le plan physique que psychologique. Elle avait perdu un peu de poids même si ça semblait impossible et elle avait coupé ses cheveux. Ces derniers lui arrivaient autrefois au creux des reins, à présent ils s’arrêtaient juste en dessous de ses omoplates et elle avait une frange. Elle avait fait ça sur un coup de tête mais appréciait bien le résultat. Psychologiquement, c’était une autre histoire. L’annonce que lui avait faite Corentin avait été difficile à digérer. Elle en avait fait des cauchemars des nuits entières et parfois quand elle le regardait elle en avait des sueurs froides en l’imaginant prononcer les mots fatals, la baguette levée. D’un autre côté cela l’avait rendu plus forte, parce qu’elle savait qu’elle devait aider le serdaigle, elle voulait l’aider ! Le problème c’est qu’elle n’avait aucune idée de comment l’aider… Ca les avait rapprochés et éloignés en même temps. A dire vrai, elle ne savait pas du tout où ils en étaient tous les deux. Cependant, elle savait une chose : elle voulait continuer à vivre aux côtés du jeune homme…